Ba Phnom & L'Histoire de Tum Teav

Permettez-moi de vous présenter la ville de Ba Phnom qui vient d'être mise à l'honneur par le gouvernement royal. Ainsi que l'histoire de "Tum Teav" qui y est associée. Chaque année, nous nous rassemblons pour la cérémonie du Neak Ta Me Sâ (អ្នក តា មេ ស , littéralement, "Chef blanc protecteur"), qui se déroule pendant 3 jours, au mois de juillet, afin de commémorer nos ancêtres. Nous demandons au Neak Ta Me Sâ de nous accorder le bonheur, la pluie et la protection de tous les habitants de la province.

Kt ba phnom

Ruines de ba phnom

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Ba Phnom se situe proche de chez moi, dans la province de Prey Veng. Cette région n'offre que peu d'endroits à visiter, à part de belles rizières et le "lac des amours" où s'accouplent et nichent des centaines de milliers d'oiseaux aquatiques.

Cependant, pendant la période pré-angkorienne, c'était probablement la région la plus peuplée du pays. Et l'une des places de l'Empire pré-angkoriens était situé dans la région de Ba Phnom.

Or, le 5 août 2023, le gouvernement vient de classer le site de "Ba Phnom" au patrimoine culturel.

Car Ba Phnom est l'ancienne capitale de Nokor Phnom, et abrite des ruines du Ve siècle. Elle possède également deux monts et trois pagodes très anciennes.

La première pagode se nomme Wat Preah Vihear thom (la pagode au grand temple) et se situe entre les deux monts, c'est la plus importante en taille et une belle histoire y est associée (voir ci-après).

La seconde se nomme Wat Kâmpoul Chheukach (la pagode au sommet de l'arbre cassé) et se situe au sommet du mont Chheu kach (l'arbre cassé).

Quant à la troisième, elle est nichée au sommet du mont Kuk prrotï'ouw (les grottes de chauves-souris) et se nomme Wat Preah Vihear Kuk (la pagode au temple des cavernes)...

L'histoire de Tum Teav, associée au "Watt Preah Vihear thom", est une tragédie romantique khmère écrite au début en 1915, qui fut adaptée d'un poème de la fin du 16e siècle.

Nota : Tum Teav (en transcription latine) / Prononcez Toum Tï'ouw / en khmer : ទុំ ទាវ.


Cette tragédie est considérée comme le « Roméo et Juliette khmer », un incontournable de la littérature Khmère qui est étudié, depuis les années 1950, dans les écoles secondaires du royaume (seconde et terminale, plus de 100 pages).

Cette œuvre traite de la rencontre amoureuse entre un bonze novice (jeune moine bouddhiste) nommé Toum ( ទុំ ) et d'une très belle jeune femme nommée Tï'ouw ( ទាវ ).

Tous les Khmers connaissent cette histoire, au même titre que le Reamker, vous devez donc connaître les noms des personnages et, surtout, savoir les prononcer correctement, sinon vous ne serez pas compris.

Alors permettez-moi de la résumer.

Tum teav romantic epic

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Au cours de ses voyages depuis Ba Phnom, vers la province de Te'bong Khmôum (ត្បូង ឃ្មុំ), où il vend des Taok (តោក), Tum, qui a un talent de chanteur, s'éprend de Teav, une très belle jeune femme attirée par son chant.

Cet amour est immédiat et réciproque. Teav offre à Tum du bétel et une couverture en signe de son affection.

À son retour dans sa province natale, Tum, consumé d'un désir ardent, songe à la belle Teav et retourne très vite à Te'bong Khmôum pour y séjourner.

Peu de temps après, étant recruté par le roi Rama, pour chanter au palais royal, il doit à nouveau quitter Teav.

La mère de Teav, qui ignore tout de cet amour, a accepté de la marier à Meune G'noun (ហ្មឺនងួន), fils de Â'thioune (អរជូន), puissant gouverneur de la province. Les projets de mariage sont toutefois interrompus par le roi Rama qui, impressionné par la beauté de Teav, envoie des messagers pour la demander en mariage.

Â'thioune accepte d'annuler le mariage de son fils et Teav est amenée au palais.

Quand Tum apprend que Teav doit épouser le roi, il chante hardiment des paroles amoureuses pour elle. Rama, charmé par les chants et surmontant sa colère initiale, autorise le jeune couple à se marier.

Â'thioune, accablé de colère, ordonne à ses gardes de tuer Tum, qui fut battu à mort sous l'arbre de Bodhi.

Apprenant la nouvelle, Teav courut vers le lieu d'exécution, où elle se trancha la gorge de désespoir et s'effondra sur le corps de Tum.

Lorsque Rama apprit le meurtre, il fit envahir le palais d'Â'thioune et, ne tenant pas compte des demandes de miséricorde du gouverneur, il maudit sa descendance sur sept générations. Ils furent condamnés à être enterrés jusqu'au cou, dans un champ, puis décapités.

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VOCABULAIRE (transcription Latine - Khmer et phonétique) :

1) Tum Teav (Prononcez Toum Tï'ouw / en khmer : ទុំ ទាវ.).

2) Ba Phnom (Ba Phnôm បា ភ្នំ

3) Prey Veng (ព្រៃ វែង prononcez Prrèye Wèng / La longue forêt).

4) Wat Preah Vihear thom (វត្ ព្រះ វិហារ ធំ prononcez "Watt prrèr wi'hïr thôm" / La pagode au grand temple).

5) Wat Kâmpoul Chheu kach (វត្ត កំពូល ឈើ កាច់ prononcez "Watt Kâmpoul Tcheu kaït" / la pagode au sommet de l'arbre cassé ; qui est aussi le nom du mont.).

6) Wat Preah Vihear Kuk (វត្ត ព្រះ វិហារគុហ៍ prononcez "Watt prrèr wi'hïr Kouk" / la pagode du temple des cavernes ou grottes.).

7) Archoun en phonétique latine (អរជូន prononcez Â'thioune / nom du puissant gouverneur de Prey Veng).

8) Meune G'noun (ហ្មឺនងួន) le nom du fils de Archoun n'apparait pas dans les transcriptions latines, seulement dans les textes khmers.

9)  Arbre de Bodhi (ដើម ពោធិ៍ ជើង ខាល prononcez Daeum Pau thïeung Khal).

Arbre de bodhi 1 1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

10) Taok (តោក) sorte de présentoir pour offrandes.

Tauk 2

 

 

 

 

 

11) il y a eu deux ou trois rois nommés "Rama". Celui de la légende se nommait "Phrea Bat Rarma Chïeung Prey ព្រះ បាទ រាមា ជើង ព្រៃ prononcez Prrèr Bat Rrïrmïr Thïeung Prèye / Le Roi Rïrmïr du nord de la forêt (sa capital se situait près de Kampong Cham).

Notez que la transcription latine Rama, du nom du roi Rïrmïr est éloignée de la vraie prononciation.).

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La légende de Te'bong Khmôum.

C'est l'une des 25 provinces du royaume, mais c'est aussi la légende de l'arbre géant qui abritait des abeilles féroces, dont les humains étaient friands de leur miel.

Te'bong Khmôum ត្បូង ឃ្មុំ = littéralement au sud des abeilles. 

Les vents dominants venant toujours du nord, toute personne qui passait au Nord de l'arbre se faisait piquer à mort ; les abeilles humant la présence des humains dont l'odeur était portée par le vent. Il était donc sage de passer au sud de l'arbre et, surtout, ne point tenter de dérober le précieux nectar.

Tebong khmoum